De ma vie, jamais j’aurais pensé écrire ça. C’est guedin comme on change. À vingt-neuf ans encore, je portais mes orgasmes comme des fleurs à mon corsage, toute fière de jouir « en trente secondes douche comprise » comme dit Maïa Mazaurette, petite prétentieuse qui te regarde dans les yeux en tombant des nues « Quoi, tu jouis pas, toi? »
Moi, la prétentieuse. Pas Maïa Mazaurette.
Bref, tout ça pour dire que le sexe était le vague et unique engagement politique dont j’aie jamais pu me targuer. Mais téma l’emploi des temps. L’imparfait.
On dirait que j’ai renoncé à jouir, depuis trois ans.
Tu as bien lu.
Si, si.
Non, pas meskina
Je ne vais pas dire que ça s’est fait sans douleur. Pour renoncer à avoir des orgasmes, faut qu’il y ait une sacrée putain de raison. La douleur donc. Le sexe a commencé par me rendre profondément triste. Il m’arrivait de me mettre à pleurer ou d’arrêter brutalement de me masturber, tordue par un coup de poing de chagrin.
Et puis le sexe, tu peux pas vivre une minute sans qu’on te le foute sous le nez, à peu près partout. Ça m’a chié dans les bottes au bout d’un moment. Vraiment. Ras le cul de ces gens qui se frottent comme des tas de chairs débiles. Exactement comme enfant voir des adultes s’embrasser faisait monter en moi un savant mélange de gêne et de colère, la moindre scène de cul à l’écran me filait des envies kamikazes. Autant te dire qu’à cette période-là, Pute avait bien du soucis à transporter ses valseuses.
Et puis il y a eu plus récemment le dégoût pur et simple. Là, il n’était plus question de choix, politique ou autre. Niet. Impossible d’envisager d’être ne serait-ce qu’excitée; même contre 1 million de dollars, même contre la paix dans le monde.
Et comme le temps guérit tout, je suis passée à l’indifférence. C’était chouette, je recommençais à écrire.
Ce qui ne veut pas dire que je n’ai plus de vie sexuelle. Ce serait le cas j’imagine si j’étais célibataire mais la vie est mal faite, j’ai une famille aimante. Tiens par exemple hier, j’écrivais et d’un coup je me suis mise à rire (je m’amuse bien toute seule) deux secondes plus tard j’escaladais Pute et je le flûtais à m’en faire saigner les gencives et c’était intense et formidable. Et oui, physiologiquement parlant, mon corps a bien répondu de manière fluide en prenant du plaisir mais ça ne me donne plus envie d’avoir un orgasme à mon tour. J’ai des pulsions sexuelles. Je connais l’excitation. J’ai même envie de baiser.
C’est le paroxysme dont je ne veux plus. C’est la fin qui m’insupporte.
Je me sens bien dans cet entre-deux, loin de la mort, même petite.
Plus de fin, non.
Plus.
Welcome home VF… C’est beau comme un jour sans pain. Courageux aussi dans ces temps injonctifs à la baise et au plaisir à tout prix. Jouis, consomme, tu sais pas qui te violera.
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La dernière fois que j’ai été pris d’un fou rire en écrivant, je devais sortir les chevaux au pré juste après… Je suis tellement heureux que ces chevaux ne soient pas une famille aimante… tu n’imagines même pas.
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C’ est bon de vous lire…
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Psychologisation à outrance d’une fonction somme toute basique de nous les êtres humains : baiser.
Mon conseil, va plutôt voir un psy qu’un sexologue.
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Je crois que n’ai pas envie que ça change. Pas pour l’instant.
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SI tu le vis bien… c’est bien. SI tu le vis mal, ça peut être mieux.
ON A LE DROIT DE NE PAS JOUIR, homme et femme.
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je tombe sur cet article par hasard et suis encore surprise qu’il m’ait/me touche autant.. merci !
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Ben il t es arrivé quelque chose voilà 3 ans? (Heu… ce n est pas une question à reponses hein!)
Tu as abandonné un de tes rêves? ( ca non plus)
Parfois quand on s oublie on a plus de désir ou d envies. On se zombifie. On devient une machine.
Pense à toi bordel! Et rêve. Ne pas rêver son futur c est un peu comme une civisilisation qui ne tendrait plus vers une utopie!
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Une lecture rugueuse comme la langue d’un vieux chat ; dont on est content de savoir qu’il ronronne.
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J’aime bien ce que vous écrivez. Il y a quelque chose qui croise l’intime et l’universel. De ce que j’en comprends, il y a deux problématiques différentes :
1 – le sexe, et encore plus l’orgasme, a quelque chose de suicidaire. S’il doit y avoir une petite mort, pourquoi vouloir mourir, même en petit ? Peut-être pour vaincre la Mort, faire des enfants, perpétuer la Vie ? Je n’en suis pas convaincu. Continuer la Vie, enfin l’espèce, cela reste mourir soi-même. Il y a quelque chose d’insupportable dans cette soumission à cet idéal.
Si on se fait chier à vouloir ressembler à Baudelaire, Annah Arendt ou à poser des robots sur des comètes, c’est justement pour ne pas être que des papillons, qui ont a peine le temps de baiser avant de redevenir la poussière.
Puis, il faudra bien se l’avouer un jour, le sexe, et plus encore l’orgasme, est une déception. Tant d’efforts pour quelques secondes de spasmes. Tout ça pour ça. Merci c’est fini. C’est triste. C’est solitaire. Même à deux. Oh la magie de la rencontre ? Raté ! La peau est une frontière et il ne se passe jamais rien de vraiment décisif au-delà. Peut-être le sexe peut se transformer en art. Mais ceci doit être exceptionnellement rare.
La vérité est que pour aimer le sexe, et encore plus l’orgasme, il faut n’avoir aucune estime de soi : laideur des corps, des crispations, sensation moite, éventuellement des mauvaises odeurs et finalement la mort.
2 – le sexe, et encore plus l’orgasme, est devenu la norme. C’est maintenant une obligation sinon un élément de l’ordre moral – avec bien sûr la culpabilité de ne pas jouir.
Jouir, pour les moins de 50 ans, n’a jamais pu être une revendication politique. Depuis l’age de l’hyper sexualisation, qui coïncide à peu près avec l’arrivée du sida, le sexe ne porte plus aucune rébellion ou contestation. C’est devenu un comportement social global. Tout a été mis en place pour le saint orgasme : la conception, les préservatifs, les sex-toys et autres accessoires (dont les gels et lubrifiants) et un matraquage systématique (dans ta pub, ta radio libre, ta musique, etc.). Il n’y a pas d’issue. Tu dois jouir sinon tu n’es pas normal. Le sexe, et encore plus l’orgasme, est la continuité de la bourgeoisie par d’autres moyens.
Alors oui, dans une époque déjà lointaine, il y a bien eut une libération sexuelle. La formule le dit : c’est le sexe qui été libéré, pas l’humain. Nous sommes toujours prisonnier de nos pulsions mais nous sommes maintenant obligés d’en faire une fête ! Ainsi, nous avons transformé la tristesse en devoir.
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Dans la culture du viol, le sexe est politique.
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Radieux. L’enclave parfaite entre le dédain et le dégout
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Es tu dead ? As tu rejoint un couvent, une secte, un hp ? Je decouvre ton blog…. je crois qu’on nous a menti. On a ete adopte. Nous sommes soeurs…..
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Salut Sauvageonne, j’ai mis 3 mois à retrouver mon mot de passe. Un enfer. Pendant ce temps, une ex un peu rebelle venait souvent à la maison jouer au scrabble et me sucer tendrement avec ses petites joues de hamster. Je dois dire que ça m’a toujours déstabilisé même après avoir lu tous les bons conseils de doctissimo. j’ai vraiment du mal avec la maltraitance des rongeurs. Pour ne rien arranger elle avait décidé de naitre avec un ratelier peu rassurant, confortant ma thèse sur sa sournoise identité de souris avaleuse. On ne se méfie jamais assez c’est ça le problème.
C’est vrai qu’on aurait pu être soeurs jumelles, avec un peu de consanguinité quand même parce qu’une fois avoir lu ‘Sperme’ on a du mal à ne pas vouloir exaucer ce souhait si légitime.
Bien à toi, d’un dimanche où l’on s’emmerde sec
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